Bijoux
Ça faisait un bail que mon p'tit père n'avait pas été
voir son toubib préféré, aussi était-il temps de faire un petit bilan
poids-taille-etc, histoire de rassurer maman. J'y vais en préparant les
boules quiès, en général Numérobis n'aime pas se faire tripatouiller
dans tous les sens - mais ô surprise, mon Bébé est devenu un homme,
pendant tout l'examen il ravalera stoïquement un énorme sanglot qui ne
franchira pas le seuil de ses lèvres bloblotantes - "T'as vu Maman
comment je suis fort ?"
C'est le
même médecin qui a suivi mes deux garçons ; signe particulier : que tu
sois premier sur son planning ou dernier de la journée (j'ai eu le temps
de tester toutes les positions horaires, en 5 ans), ne t'en fais pas, à
chaque fois il aura 3/4 d'heure de retard. Rendez-vous est pris à 9h30,
je sais pertinemment que je sortirais pas avant 10h45 - avec de la
chance. Pourquoi je continue à le consulter, me direz-vous ? Parce que
quand j'étais une maman toute neuve et paniquée, il m'a complétement et
totalement rassurée, et que lorsque le problème est grave (comme avec
les crises d'asthmes de l'aîné l'an dernier) il est efficace et
entièrement disponible - et en plus il est toujours souriant, il a un
humour tout pourri et j'aime bien. Alors bon, pour tout ça je veux bien
glander une heure dans la salle d'attente verte, avec en guise de
magazines des manuels de maths niveau 4e et pour occuper les petits
patients des mini chaises multicolores et grinçantes (eh oui j'ai pensé à
tout sauf à glisser quelques jouets dans mon sac de Mary Poppins).
Bref, voici venu notre tour, après avoir épuisé
tous les charmes de la salle d'attente : "Rhoo regarde les jolies
plinthes.."
Déshabillage,
pesée, examen yeux-oreilles-ventre, les mêmes blaguounettes répétées à
chaque consultation : "Alors bonhomme, avec un prénom pareil tu vas en
séduire des demoiselles !" (là si tu connais pas le
prénom de mon poussin la blague tombe à plat.), exclamations
euphoriques, que dis-je, quasi orgasmiques, devant la balance parce que
la courbe de croissance a fait un très joli bond cet été, après avoir
rasé les pâquerettes pendant 2 ans : "Bravo Bonhomme ! Bravo à Maman qui
t'a fait de bons petits plats !!" (là j'évite de croiser le regard de
Bébé qui, s'il avait l'âge, prendrait sans doute un air narquois),
remplissage de paperasse pour la pmi, heureusement j'ai révisé :
"Allaitement ? Combien de temps ? et le sevrage ? vous avez des robinets
en plomb ?" Je lui jette un œil avec le sourcil en forme de V - comme
dans "Perplexe" - mais il est très sérieux.
En
parlant d'outillage : "Et le décalotage ?"
Blanc.
J'ai beau
avoir 2 garçons et presque-zéro tabou, j'ai bien un petit souci
d'ordre technique : le décalotage. Pour faire court (chuuuut, ne ris pas), j'ai dû le faire une ou deux fois
à mon premier loustic, puis stop - trop peur de lui faire mal - et puis
les avis restent quand même mitigés sur l'utilité de la chose. Je n'ai
jamais trouvé de réponse claire nulle part, et finalement je me dis
qu'une petite vérification de temps en temps pour écarter les risques de
phymosis, pourquoi pas, mais pas plus. "Il y a quelques adhérences
quand même. A surveiller". Moi intérieur : "Ah-m..." - Moi dehors
opinant du chef "Oh-oui-bien-évidement". Lui : "Et les testicules, elles
sont bien descendues ?". Moi intérieur : "Non ne réponds rien. Ne dis
surtout RIEN" - Moi dehors : "Alors là, vous savez, je suis pas une
spécialiste de..." - Moi intérieur : "NAAAAAANN t'as pas dit ça ! NAN
elle a pas dit ça !" Gros bruit de crissement de frein dans ma petite
cervelle, marche arrière toute, trop tard c'est sorti.
Bouillante de confusion je lance un coup d'œil
de côté sur le médecin qui en temps normal n'aurait pas laissé échapper
la perche, mais tout à coup la fin de l'examen semble nécessiter une
concentration extrême. Ouf.
Je vous épargne la fin de la consultation, non non je n'ai pas dû recommencer plusieurs fois le chèque du règlement parce que je me trompais de montant, non non je n'acquiesçais pas comme une gourde aux conseils de prudence du médecin à propos des accidents domestiques alors que mon fils était en train d'escalader sa table, du tout,du tout. Je survis à ma honte en songeant, une fois sortie : "De toutes façons on ne se reverra pas avant plusieurs mois, d'ici là il aura oublié".
Non ?
~~ Pitié, racontes-moi la dernière fois que tu as connu un grand moment de solitude, que je me sente moins seule !
~~ Combien d'allusions tendancieuses absolument involontaires (j'insiste) as-tu repéré dans ce texte ??