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C'est quoi ce bazar ?
23 décembre 2013

Metro Bobo Veto

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Je sors de chez le vétérinaire en brandissant la boite orange fluo contenant mon chat pas content. Forcément, lui pas plus qu'un autre n'aime les aiguilles à vaccin ni se faire tripoter et examiner des dents au troufignon. En plus Monsieur est un chat d'appartement, or dehors c'est décembre, or dehors il fait froid. Délestée de quelques économies mais plus riche de quelques pipettes anti-puces pour entrer dans 2014 sans me gratter, je traverse la rue à petits pas rapides en m'agrippant à la poignée de la boite, quand un monsieur arrivant en face de moi m'interpelle timidement : "Excusez-moi de vous déranger mais..." il désigne le matou, puis le cabinet vétérinaire d'où je sors "Est-ce que je peux me permettre de vous demander si vous sortez de là ?" (Non, je balade mon chat de 3 kilos tous les matins comme ça, ça lui fait voir du pays. Monsieur est poli ET perspicace). J'acquiesce. "Comment vous les trouvez ? ils sont aimables ? ils sont gentils ?" Comme je me répands en compliments sur la vétérinaire, d'autant plus disponible pour discuter que j'ai le sentiment que mon greffier est son seul patient depuis les 3 mois que le cabinet est ouvert, et que visiblement les deux stagiaires de 3e qui tournent en rond à l'accueil s'ennuient fermement en se refaisant mutuellement les couettes - j'ai vu l'épouvante passer dans les yeux de l'une d'elles, lorsque sa patronne l'a chargée de peser mon chat, d'abord en pesant la boîte, puis en pesant la boîte AVEC le chat ; puis (horreur) en faisant une soustraction. Pendant qu'elle s'acharnait à tapoter sur une calculette, mon chat a poussé la grille de sa caisse et a foncé droit vers la porte d'entrée, déclenchant moultes DING DONG annoncant normalement l'arrivée de nouveaux clients. L'autre stagiaire lève un oeil intéressé (du monde ? de l'action ? Justin Bieber ?), puis, déçue et lasse, retourne arracher ses cuticules devant un ordinateur où brille l'absence de rendez-vous. Je finis par aller remettre moi-même mon Pépère affolé dans sa caisse où il s'affale avec le soupir de l'aventurier épuisé par l'ascension du Grand Canyon, tandis que la toubib s'impatiente : "Bon, ça vient, cette soustraction ??"

Sorti de ce chaos organisationnel par faute de combattant, j'assure au monsieur que le médecin me semble très professionnel et très disponible pour répondre à toutes les inquiétudes (tu m'étonnes).
Il me sourit, puis après une hésitation vient la vraie question : "Vous pourriez me dire, s'il vous plait, combien ils prennent pour une consultation ?" Je grimace,  j'en ai eu pour cher évidemment : consultation + vaccin + pipettes anti puces + vermifuge (et encore j'ai échappé au spray à vaporiser dans toute la maison après évacuation du logis, aux croquettes vétérinaires diététiques spécial chat jeune/castré/à poils longs vendus par 50 kilos). Le monsieur insiste, il a réellement besoin d'une estimation, je lui en donne une que je n'espère pas trop fausse. "Ah", il baisse les yeux d'un ton résigné sur le chien qu'il tient en bout de laisse. Un vieux cabot tout rapé, tout sage, tout jauni, qui dès qu'il comprend que son maître lui témoigne son attention, se met à frétiller de la queue, s'ébroue et, même (oui), sourit. Le bon vieux pépère fidèle dont tu as automatiquement envie de flatter le postérieur. Une brave bête.
"Vous comprenez, il a une boule sur le dos, et ça m'inquiète, ça s'en va pas, ça grossit, alors...".
Le monsieur et son chien se considèrent l'un l'autre. L'âge avancé de la bête est sans équivoque, l'amour que lui voue son maître non plus. Qui sait le nombre d'années, de drames et de bonheurs que ces deux-là ont partagé. A présent que j'y porte attention, ce monsieur à la rare politesse n'est pas rasé de frais, est loin d'avoir l'oeil d'un gardon frétillant et porte des vêtements élimés, mais son inquiétude se porte toute entière vers son compagnon. Je l'encourage à aller au moins demander conseil, "Il ne faut pas le laisser comme ça". Il me sourit tristement "Je vous remercie, et pardon encore de vous avoir abordée de cette façon, mais c'était important pour moi d'avoir des avis et de ne pas aller voir n'importe qui". Nous nous saluons et continuons notre chemin.

J'ai un noeud dans le ventre, je n'ose pas me retourner pour vérifier s'il a poussé la porte du cabinet vétérinaire.

 

 

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Commentaires
P
Un animal c'est un membre de la famille, on est aussi désemparé et sans ressource que pour un humain.
J
Un texte d'une rare sensibilité... <br /> <br /> Bonnes fêtes... même si je connais ton aversion pour Noël. Bisous
A
Ca m'a fichu un coup, je t'avoue... Trop sensible ??
J
C'est triste et émouvant cette histoire...
S
bbbrrrr... je frissonne d'émotion, en te lisant...<br /> <br /> Les bestioles à poils et moi, c'est une longue histoire qui m'a déjà plusieurs fois laissée sur le carreau, après la perte de très fidèles compagnons de route.
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